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La journée a été assez calme bien que l’on ait entendu le canon sans arrêt. Vers le soir on met en batterie les grosses pièces vers Saint Brice. A sept heures ¾ du soir nos troupes se livrent à une attaque dans les parages de Courey à la Neuvillette. Les mitrailleuses et les fusils crépitent pendant environ une heure ½ dans les environs de chez mon père, puis s’éloignent soutenus par les canons. Le combat dure toute la nuit et au petit jour on entend encore les canons. Nos troupes on repris leur position.

Gaston Dorigny

Nous sortons au cours de la matinée, mon fils Jean et moi et, tandis que nous sommes dehors, nous allons jusque dans le champ de Grève où nous voyons toujours en position, à gauche de l'avenue de la Suippe et un peu en contre-bas, deux batteries d'artillerie dont les pièces - des 75 - sont dissimulées avec des branchages. Pour le moment, elles ne tirent pas ; les hommes se divertissent entre eux

Notre attention est attirée, de loin, par une quantité d terrassiers, occupés à creuser des tranchées dans un champ longeant le haut de la rue de Sillery. A distance, nous voyons un grand nombre d'animaux étalés l'un auprès de l'autre, sur le talus limitant les propriétés où avait lieu, en juillet, le concours international de gymnastique. Nous nous approchons et nous pouvons compter soixante chevaux et un bœuf, dont on prépare l'enfouissement.

Ces animaux ont tous été tués par les obus, en ville, ces jours derniers.

Partout où l'ennemi avait repéré de la troupe, on avait eu, dans Reims, à côté des dégâts effrayants du bombardement et de l'incendie, de tristes visions de champ de bataille. C'est ainsi qu'en dehors des nombreux cadavres d'animaux restés sur les boulevards de la Paix et Gerbert, aperçus le 20, au petit jour, j'avais vu, le 21 en allant annoncer notre malheur chez mon beau-frère Montier, un groupe de sept à huit chevaux morts, rue Duquenelle, après en avoir vu déjà rue Lesage.

L'administration municipale avait dû aviser rapidement et un organisme, spécialement mis sur pied, fonctionnait pour l'enlèvement de ces cadavres d'animaux, sous la surveillance de M. Lepage Julien, inspecteur au Bureau d'Hygiène. Son important service provisoire était à l’œuvre, ce matin, en cet endroit.

- L'après-midi s'annonçant calme, nous croyons pouvoir profiter du beau temps, vers 16 h, pour faire une promenade en deux groupes devant se rejoindre chez ma belle-sœur, Mlle Simon-Concé, rue du Cloître. Toute la famille s'y est à peine rencontrée, que les obus recommencent à pleuvoir et nous obligent à renter précipitamment rue du Jard.

- Le soir, une violente canonnade, entendue de tout près, nous contraint à retarder l'heure du coucher.

Paul Hess dans Reims pendant la guerre de 1914-1918, éd. Anthropos
Un cheval mort, place Godinot

Un cheval mort, place Godinot

Canonnade peu fréquente et pas très rapprochée ; matinée assez tranquille. Après-midi, comme le matin. On parle de bombes lancées sur la ville, quartier Saint André, et Petit Séminaire. Visite aux Petites Sœurs de l’Assomption ; aux Pères Jésuites et aux Petites sœurs des Pauvres, au Collège St Joseph, visite aux Chanoines rue Libergier. Vive canonnade et à 8 heures mais pas très longue. Coucher au sous-sol. Nuit assez tranquille.

Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de Reims

Je quitte Sacy à 7H du matin, après avoir fait mes adieux aux 2 familles Perardel qui vont partir dans l’inconnu, et à celles qui, sans homme, pour les guider, décident de rester encore dans les environs de Reims.

Au moment de la séparation, l’émotion me gagne, et c’est sans mot dire, mais le cœur saignant et les yeux pleins de larmes que s’échangent les dernières effusions.

A peine rentré, j’accueille le Capitaine de Marcel et son Maréchal des logis Chef venus en ravitaillement ; on me donne l’assurance qu’à la première sortie mon cher fils sera du voyage.

Dans la nuit du 28 au 29, la bataille s’engage avec une violence extrême, les Allemands s’obstinant à essayer de rentrer en ville. On ne dort pas, le bruit des mitrailleuses et des fusils se faisant entendre de trop près pour qu’il soit possible de reposer.

Paul Dupuy - Document familial issu de la famille Dupuis-Pérardel-Lescaillon. Marie-Thérèse Pérardel, femme d'André Pérardel, est la fille de Paul Dupuis. Ce témoignage concerne la période  du 1er septembre au 21 novembre 1914.

Source : site de la Ville de Reims, archives municipales et communautaires

Tag(s) : #Famille Dorigny, #Paul Hess, #Cardinal Luçon, #témoignages, #1914, #Paul Dupuy
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